Mon art est une contemplation active qui donne forme à mon esprit et l’unifie dans la forme qu’il crée : mais pour l’unifier, paradoxalement, il ne cesse d’ouvrir l’esprit en abîme à la plénitude inconnaissable, « apparue » sous les espèces de la beauté. C’est donc une interrogation déchirante, un oui sans retour, non point à la seule capacité créatrice de l’esprit, mais à la transcendance qu’elle figure, au Principe sustentateur de la pensée. Cet art réunit à l’essence, au Verbe où beau et vrai se confondent dans un rayonnement, un émerveillement primordial. Le mystère du vrai, sa beauté rayonnante, sont perçus dans ce face à face émerveillé où l’esprit est deux et un avec ce qu’il contemple et reflète. Je prie pour que nous rapprenions, nous poètes, à susciter, par des moyens simples, cet émerveillement dans l’âme du premier venu. Sans doute convient-il d’abord que l’artiste devienne lui-même le premier émerveillé, le premier ébloui, face à face, par les rayons mystérieux.
Ligne de faîte, « Le fragment, le chantier, la ruine ».