PIERRE EMMANUEL

Un poète dans le siècle


 

 

« Car ce qui est en cause dans toutes nos manières d’être, de penser, de nous exprimer ou de nous taire, de faire nos choix politiques ou de nous situer par rapport à "l’esprit du temps", c’est l'avenir immédiat de cette réalité que nient de plus en plus fort l’idéologie et la science : la nature humaine. »

 

L’arbre et le vent  

 


 

     « J’ai dit suffisamment que je n’étais un écrivain que dans la mesure où j’étais un être vivant, et donc qu’écrire n’était pour moi qu’une façon de corroborer l’expérience, de l’approfondir, de répondre à certaines de ses interrogations, de pousser plus avant un questionnement intérieur qui avait sa source dans la réalité quotidienne, en entendant la réalité quotidienne, bien entendu, comme l’ensemble des questions que soulève la présence au monde d’un être vivant, parce que si l’on limite la réalité quotidienne au simple fait des activités d’une journée considérée de l’extérieur, ça n’est pas de la réalité quotidienne. Nous sommes à la fois ces êtres déterminés par des exigences sociales, professionnelles, d’horaires, ces nécessités de la vie de chaque jour, et des êtres indéfiniment questionnant, qui nous posons comme une interrogation insistante et fondamentale, la question du pourquoi de notre existence, et il y a le comment de notre vie ordinaire. Je crois que c’est très important pour se rendre compte que la vie quotidienne n’est pas la vie quotidienne ! » (Entretien inédit)

 

     Cette attention, ce questionnement font de Pierre Emmanuel, aussi, un homme d’action. Dès les années 30 il s’investit dans la réflexion politique, s’intéresse aux mouvements de gauche de l’époque, est un des premiers fondateurs des groupes Esprit à Lyon.
     La montée des totalitarismes l’effraie. Il voit arriver les réfugiés de la guerre d’Epagne dans le Béarn, suit l’ascension d’Hitler avec une inquiétude à la mesure de l’événement. La déclaration de la guerre, l’exode s’enchaînent très vite. La poésie lui est un moyen d’expression de sa pensée ; mais rapidement, lorsqu’il arrive à Dieulefit, il s’engage aussi dans une résistance plus immédiate.
     Après la guerre Pierre Emmanuel ne pense pas que tout soit résolu. Jusqu’à la fin de sa vie il est au service des droits de l’homme, en particulier du droit à la parole et à la culture, en travaillant au Congrès pour la liberté de la culture et en s'investissant dans le Pen Club, en parcourant le monde pour y faire des conférences.
     Il s’investit dans les médias, travaillant d’abord dans la radio, puis comme premier président de l’Institut National de l’Audiovisuel, enfin comme concepteur visionnaire de la vidéothèque de Paris.
     Pierre Emmanuel assume aussi un certain nombre de missions officielles, dès 1947 (il est envoyé dans l’Europe de l’Est pour y étudier la place de la francophonie) jusqu’en 1983 où s’ouvre la Maison de la Poésie. Son élection à l’Académie française, en 1968, l’amène à être davantage sollicité pour des missions liées au ministère de la Culture ou de l’Éducation.

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