PIERRE EMMANUEL

Culture noblesse du mondeStock, 1980

     La culture, dans son acception sociale, n’est pas un secteur de la vie nationale mais une forme donnée à celle-ci. La culture est donc une notion politique entrant dans le gouvernement même de la société. Elle recoupe presque tous les domaines ministériels de type social (éducation, jeunes, environnement, communication, recherche scientifique, Université, santé, condition féminine, personnes âgées, D.O.M-T.O.M., etc.). Elle concerne les collectivités régionales et locales, mais aussi tout le réseau associatif, et suppose donc, de la part du gouvernement, une conception politique de la régionalisation et de la concertation.
     Dans son acception traditionnelle, la culture est, à proprement parler, la vie même de l’intelligence française, l’ensemble des représentations symboliques qu’à travers son histoire s’est donné de lui-même et de sa vitalité créatrice l’esprit français. C’est donc un patrimoine dont la première richesse est la langue. La défense et l’illustration de ce monument qu’est la langue passe avant même la préservation des autres monuments. Protéger la langue est chose nécessaire, à l’étranger comme sur le territoire national. L’universalité de l’esprit français est d’ailleurs un élément essentiel de la politique étrangère. Celle-ci est donc partie prenante dans toute politique culturelle à venir, qui suppose une idée de la France dans le monde, idée qui doit déterminer la forme de cette politique à l’intérieur de notre pays.


     Culture noblesse du monde paraît en 1980, presque en même temps que L’Autre, aux éditions Stock, précédé d’une préface de Jacques Chirac, car Pierre Emmanuel est alors délégué national à la culture du RPR.
     Le livre porte en sous-titre : « Histoire d’une politique ». Culture noblesse du monde situe les problèmes de la culture en rapport avec ceux de notre nation et constate « les déséquilibres fonctionnels du ministère Malraux.
     Pierre Emmanuel s’interroge alors sur le bien-fondé des structures étatiques dans le domaine culturel : « il n’est plus aussi évident », pense-t-il, que la culture « doive être une affaire d’État » parce qu’elle est avant tout une « qualité de la société civile ». Il affirme en conclusion « trois principes » qui devraient « commander et limiter toute action publique :
     1° Si l’accès à la culture doit être facilité au maximum, aucun fonctionnarisme de la culture ne peut être systématiquement imposé aux citoyens. (…)
     2° Le signe de la vitalité d’une culture est la production des oeuvres. (…)
     3° La pluralité des cultures régionales et sociales, la diversité des milieux culturels et leur autonomie seront acceptées comme des faits positifs de l’évolution sociale. »